Intervention de Avishai Bar Asher
Colloque La Kabbale de Safed
Deux manuscrits exceptionnels.
Spécialiste international des textes kabbalistiques et de leur histoire, le professeur Avishai Bar Asher enseignant à l’université hébraïque de Jérusalem dans le département de Pensée juive présente les deux manuscrits hébreu 788 et hébreu 789.
Ces manuscrits, commentés par le kabbaliste Moïse Cordovero ont été acquis en Italie par Jacques Gaffarel pour le compte du Cardinal de Richelieu, puis ont appartenu à Gilbert Gaulmin avant de rentrer dans les collections de la BnF. Chacun d’entre eux est d’une grande importance pour l’étude de l’histoire de la Kabbale dès le début de la période moderne jusqu’à nos jours. Comme toute bonne histoire, leur curieux récit contient plusieurs chapitres et son intrigue se déroule sur plusieurs centaines d’années, à travers divers lieux et personnages remarquables.
La présentation d’Avishai Bar Asher, co-animée par Laurent Héricher et Michael Sebban, est suivie d’une discussion et de questions du public.
La Bibliothèque nationale de France (BnF) est un trésor inestimable de connaissances et de culture, abritant des collections uniques qui retracent l’histoire intellectuelle et culturelle de l’humanité. Située sur le site Richelieu, la BnF a récemment rouvert ses portes au public après une décennie de travaux de rénovation, offrant ainsi un accès renouvelé à ses précieuses collections. Parmi les joyaux de la BnF, le département des manuscrits hébreux se distingue par sa richesse et son histoire fascinante. Avec plus de 1 500 manuscrits, ce fonds est l’un des plus anciens de la bibliothèque, témoin de siècles d’histoire juive et de transmission du savoir.
La conférence organisée à la BnF a mis en lumière deux manuscrits particulièrement remarquables, Hébreu 788 et Hébreu 789, en présence de spécialistes tels que le professeur Avishai Bar Asher de l’Université Hébraïque de Jérusalem. Ces manuscrits, datant du XVIe siècle, sont des copies d’une œuvre majeure de la littérature kabbalistique : le commentaire “Or Yaqar” de Rabbi Moshe Cordovero sur le “Zohar”, l’un des textes fondamentaux de la Kabbale. Ces documents, ayant traversé les siècles, témoignent de la transmission complexe et parfois secrète des savoirs mystiques à travers le monde.
La conférence a permis de plonger dans l’histoire de ces manuscrits, révélant les détails de leur création, de leur transmission et de leur conservation. Les manuscrits ont été copiés par des scribes en Italie, peu après la mort de Cordovero, et ont traversé différentes étapes de censure et de collection, passant des mains juives aux mains chrétiennes au fil des siècles. L’étude de ces manuscrits ne se limite pas à leur contenu textuel, mais s’étend à leur matérialité, offrant des indices précieux sur le contexte historique et culturel de leur époque.
L’importance des manuscrits hébreux de la BnF va au-delà de la simple conservation de textes anciens. Ils constituent une fenêtre sur l’histoire intellectuelle et spirituelle de diverses époques, permettant aux chercheurs de s’immerger dans les débats théologiques, philosophiques et mystiques de leur temps. La conservation et l’étude de ces documents sont essentielles pour comprendre l’évolution des idées et des traditions qui ont façonné la pensée humaine.
En conclusion, la BnF joue un rôle crucial dans la préservation et la mise en valeur de notre patrimoine culturel. À travers des événements comme cette conférence, elle continue de promouvoir la recherche et le partage des connaissances, rendant accessibles des trésors cachés de l’histoire humaine. Les manuscrits hébreux, avec leur richesse et leur complexité, sont un exemple éloquent de l’importance de ces efforts, et de la manière dont ils enrichissent notre compréhension du passé, tout en inspirant les générations futures.
• Les manuscrits : Deux volumes contenant environ 10% du commentaire Or Yaqar de Cordovero, copiés en Italie du Nord peu après la mort de l’auteur.
• Provenance et histoire : Le manuscrit 788, avec une reliure luxueuse, provient de la collection du Cardinal de Richelieu, acquis par Jacques Gaffarel en Italie. Le manuscrit 789, avec une reliure plus simple, a appartenu à Gilbert Gaulmin avant d’arriver à la BnF.
• Codicologie : L’analyse codicologique révèle des numérotations originales, des tampons de différentes bibliothèques (Sorbonne, Bibliothèque Royale), des annotations en latin par des bibliothécaires (dont Gaffarel et Gaillet d’Ossentiel), et des traces de censure chrétienne.
• Copiste : Les manuscrits ont été copiés par un seul scribe juif italien du XVIe siècle, probablement Rabbi Ezra De Fano, un érudit kabbaliste en contact avec les kabbalistes de Safed.
• Censure chrétienne : Les manuscrits portent des traces de censure chrétienne, notamment la suppression des mots « Goy » (Gentil) et « Gilgoul » (transmigration des âmes), ainsi que des annotations explicatives par des censeurs.
• Contenu et interprétation : L’analyse du contenu révèle des informations sur l’organisation du Or Yaqar, les pratiques de copie et les tentatives de publication. Un exemple d’interprétation de Cordovero sur un passage du Zohar est présenté, illustrant sa méthode et son approche originale à propos du commandement biblique de restituer l’objet perdu à son propriétaire